Le premier site français sur Robert E. Howard

Accueil > Illustration/BD > Le Conan des bandes dessinées

Le Conan des bandes dessinées

dimanche 23 décembre 2007, par Patrice Allart

Après les superbes couvertures de Frank Frazetta pour l’édition en volumes des aventures de Conan (1966-69), il ne restait plus qu’un pas à faire pour le héros de R.E. Howard afin de passer de la forme littéraire à la bande dessinée. C’est en octobre 1970 qu’il effectue sa première apparition sous cette forme. Roy Thomas, scénariste nouvellement promu éditeur chez Marvel Comics, a deviné qu’il faut prospecter ailleurs pour renouveler les habituelles histoires de super-héros qui s’essoufflent. Thomas cherche l’inspiration au sein des autres médias, cinéma et littérature, et dans d’autres genres, soit tombés en désuétude comme l’épouvante, soit relativement neufs comme la fantasy. Ce nouveau programme donne lieu à quelques succès, comme Tomb of Dracula et Ghost Rider, et à beaucoup d’échecs, comme Frankenstein, Son of Satan et Skull the Slayer. Mais aucun titre ne connaîtra le même triomphe que Conan the Barbarian, le seul des années 70 à avoir survécu à la décennie (et même à la suivante !). A l’époque, Thomas ne croit pas pouvoir acquérir les droits d’un personnage aussi populaire et pense à Thongor, un sous-Conan dû à Lin Carter. En fin de compte, il lui est plus facile d’obtenir les droits du héros de Howard. Pour des raisons budgétaires (car il ne croit pas au personnage), Stan Lee, président de Marvel, lui refuse John Buscema, artiste-vedette de la compagnie depuis le départ de Jack Kirby. Thomas (suffisamment confiant, quant à lui, dans le potentiel de son acquisition pour en écrire les textes) doit se contenter d’un jeune Anglais très influencé par Kirby et dont les premiers travaux étaient loin d’être convaincants : Barry Smith.

JPEG - 46.2 ko
Premières planches de Smith en 1970 (publiées chez Soleil)

Les premiers numéros, d’ailleurs, n’obtiennent pas un grand succès mais au moins Smith s’est-il débarrassé de l’influence kirbienne. La série débute par une scène de bataille se déroulant peu après le sac de Venarium, qui deviendra par la suite un événement-clé dans la saga. La première séquence - un duel à l’épée entre Conan et un Asgardien - est devenue célèbre également, au point d’être souvent copiée. Ce premier épisode est peu convaincant, tant graphiquement qu’au niveau du scénario, mais le scénariste y présente, au moyen de flash backs magiques, ses intentions futures concernant la saga, de l’engloutissement dans un passé lointain de l’Atlantide où vécut un roi nommé Kull jusqu’au couronnement de Conan. Cela lui est d’autant plus facile que les aventures de Conan ont déjà été mises en forme par Sprague de Camp. Une séquence est néanmoins à mettre au compte de Roy Thomas, celle où le jeune Cimmérien a une vision de lui devenant roi, vision qui le hantera toute sa vie. Ce n’est pas une mauvaise idée, ni une trahison vis-à-vis de Howard, le destin et son inéluctabilité ayant toujours joué un grand rôle dans son œuvre. Le quatrième numéro est la première adaptation d’une histoire de Conan écrite par Howard, et une des plus belles : La Tour de l’Éléphant, qui rejoint le vieux précepte de Stan Lee au cœur de toutes ses histoires de super-héros - ce que l’Homme nomme Monstre l’est bien souvent moins que lui-même -. Conan y libère un monstrueux extra-terrestre d’un ignoble sorcier, la barbarie n’excluant pas la compassion. Le troisième épisode (Le Crépuscule du Dieu Gris) est le premier exemple d’une pratique où Thomas va passer maître : l’adaptation de nouvelles fantastiques ou historiques de Howard, transformées en aventures inédites de Conan. Cette pratique prouve la parfaite connaissance qu’a le scénariste de l’œuvre originale. Il serait trop facile de lui reprocher son manque d’originalité car la façon dont il intègre ces histoires à la continuité donne lieu à un univers dont la cohérence est sans failles. Certes, le manque d’originalité a aussi été reproché à Sprague de Camp (souvent qualifié de vampire) lorsqu’il remaniait maintes histoires de Howard pour les intégrer à sa propre vision de l’univers hyborien, mais il ne faut pas oublier que R.E.H. lui-même, avant tout un écrivain populaire, remania souvent ses nouvelles, les transformant totalement, pour leur permettre une publication après un refus initial. Le Crépuscule du Dieu Gris en est un exemple. Une première version était un récit historique comme le barde de Cross Plains les affectionnait, intitulé Les Lances de Clontarf, qui se déroulait pendant une fameuse bataille du XIe siècle entre Gaëls d’Irlande et l’envahisseur danois. Son héros s’appelait... Conn ! (l’histoire a été écrite en 1931, soit un an avant la première apparition du fameux Cimmérien). Refusée, elle a été réécrite peu après pour devenir Le Crépuscule du Dieu Gris, avec les mêmes personnages, mais l’Histoire y tenait une place moins prépondérante et le surnaturel y faisait son apparition. Néanmoins, cette version fut également refusée. C’est celle-ci qui sert de base à Thomas pour cette troisième version, dessinée. Il est facile pour le scénariste de transformer Conn le Gaël en Conan le Cimmérien (probablement un ancêtre).

JPEG - 41.1 ko
Conan the Barbarian n°25, avril 1973 (version française chez Soleil) par Buscema


L’épisode Le Dieu diabolique (n° 7), seconde adaptation officielle, introduit un vilain imaginé par Robert Howard et appelé à jouer un grand rôle dans la saga : Thoth-Amon. Le personnage introduit par Thomas dans les épisodes 14-15 est plus inhabituel : il s’agit d’un autre héros de la littérature de fantasy, Elric le Nécromancien, créé par l’écrivain Michael Moorcock. Pour cet exceptionnel crossover (pratique courante chez Marvel qui consiste à confronter des héros d’univers différents, mais rarissime dans le cadre des séries Conan), un accord est passé entre Marvel et l’écrivain qui permet au plus célèbre des barbares de rencontrer son « émule » le plus original, le guerrier maudit à l’épée buveuse d’âmes. Au terme de l’affrontement, Elric regagne sa dimension - et les limbes de la BD, d’où il ne sortira que dix ans plus tard, pour une adaptation digne de lui chez First Comics -. Le seizième épisode est - déjà - une réédition : La Fille du géant du gel est parue initialement dans Savage Tales 1 en mai 1971, une des tentatives de la Marvel de se lancer sur le marché des magazines. Si en France le magazine est le principal format des bandes dessinées (de Métal Hurlant à L’Écho des Savanes en passant par Circus), il n’en est pas de même aux États-Unis où le comic book domine le marché. Pourtant, à la fin des années soixante, l’éditeur James Warren avait prouvé que le format magazine était viable avec le succès de Vampirella. Sous l’impulsion novatrice de Thomas, Marvel s’intéresse à son tour à ce créneau. Le contenu des magazines noir et blanc est tout désigné puisqu’ils échappent à la surveillance du Comité de Censure : l’épouvante et la violence, avec un zeste d’érotisme. Conan y a donc sa place et pourrait retrouver ces éléments contenus dans les récits originaux et jusqu’ici inexploités à cause du lectorat habituel plutôt juvénile des comics. La différence de ton (et de lectorat visé) est flagrante lorsque l’on compare la version originale de cette adaptation d’une aventure de Conan écrite par Howard avec la version censurée en couleurs parue dans Conan the Barbarian 16 l’année suivante. Mais en se voulant revue de BD destinée à un lectorat plus mûr, Savage Tales n’atteint qu’un public restreint, d’autant que Marvel a du mal à le diffuser, égaré entre les comics traditionnels et les magazines sans BD. Ce n’est qu’en 1974 que la parution de Savage Tales deviendra régulière mais le magazine poursuivra sa route sans Conan : celui-ci a obtenu son propre titre, Savage Sword of Conan, qui est le seul magazine Marvel à avoir connu le succès (un triomphe même).

JPEG - 67.8 ko
Conan the Barbarian

Avec Conan the Barbarian 19 (octobre 1972), Roy Thomas entame un long cycle consacré aux guerres turaniennes, s’étendant sur 19 épisodes (19-38, le 22 est une réédition). Barry Smith, désormais au sommet de son talent (il est actuellement considéré comme un des grands de la B.D.-U.S. des années 70), après une absence de plusieurs mois (épisodes 16-18), est de retour pour un événement majeur : la création de Red Sonja dans le numéro 23 (février 1973). L’épisode transpose un récit historique de R.E. Howard (Sonya la Rouge, 1934) en une aventure du Cimmérien et Red Sonya devient Red Sonja : la guerrière a obtenu un grand succès et est fréquemment réapparue par la suite dans Conan the Barbarian et Savage Sword of Conan, au point d’obtenir son propre titre. Sonja, l’héroïne de Roy Thomas, a supplanté la Sonya de Howard dans l’esprit des fans. Les épisodes 17-18 sont également une transposition dans le monde hyborien d’un récit du Texan, une aventure de Turlogh O’Brien intitulée Les Dieux de Bal Sagoth. L’histoire est dessinée par le vétéran Gil Kane, artiste au style souple préférant, au traditionnel M. Muscle popularisé par les couvertures de Frazetta, les héros bondissants aux mouvements élastiques. En cela, le barbare de Kane n’est pas très différent de celui de Smith : un guerrier agile, rusé, plus cérébral que les innombrables barbares brutaux. Le retour de Barry Smith est de courte durée, cinq numéros jusque mars 1973. Le mois suivant, l’Anglais, lassé, laisse la place à celui qui avait été le premier choix de Thomas : John Buscema (preuve irréfutable du succès de la série). Il fait de Conan un sauvage barbare à la Frazetta, un colosse à la force impressionnante. C’est ce Conan dont le fan du personnage de B.D. se rappelle immanquablement, un personnage plus grand que nature, particulièrement crédible dans ces scènes de batailles howardiennes où excelle l’artiste. Il est vrai que Buscema a dessiné plus d’aventures de Conan que de n’importe quel autre de ses nombreux héros. Il abandonne les séries Conan en 1981 (elles sont désormais au nombre de trois !) : après dix années d’aventures écrites par Roy Thomas, le Cimmérien compte désormais à son actif plus d’aventures en bande dessinée qu’en littérature. D’où forcément, parfois, un sentiment de déjà-lu qui ne doit pas faire oublier le niveau plus qu’honorable des histoires.

JPEG - 141 ko
Savage Sword of Conan

En août 1974 paraît le premier numéro du magazine Savage Sword of Conan. Roy Thomas y poursuit la série d’adaptations des nouvelles du créateur du Cimmérien entamée dans Savage Tales. La chronologie est réservée à Conan the Barbarian, Thomas peut se consacrer dans le magazine aux adaptations officielles, sans souci de continuité. John Buscema est chargé de dessiner la série dès le premier épisode, il en dessinera la majeure partie des épisodes pendant sept ans bien que Marvel fasse régulièrement appel à d’autres grands artistes puisqu’il n’y a pas le même souci d’homogénéité que dans les comics. Cette politique d’adaptations ne dure que le temps des années Thomas (les soixante premiers numéros), jusqu’en 1980, l’Age d’Or de la série. Thomas adapte d’abord les histoires de Howard, selon l’ordre établi par Lyon Sprague de Camp, ce n’est qu’en 1978 qu’il obtient les droits de celles de ce dernier (après une première tentative en 1974, pour SSoC 3, vite rendue caduque par le différend entre les deux hommes suite à Conan the Barbarian 37 - officiellement, « transposition » de La Malédiction du crâne d’or, fragment de Howard, en réalité, adaptation libre de La Cité des crânes de Sprague de Camp). Dans Conan the Barbarian, l’épisode 58 (La Reine de la Côte Noire, janvier 1976) adapte la première partie de la nouvelle homonyme de R.E.H. (1934) où Conan faisait équipe avec une femme-pirate redoutée, Bêlit. Mais là où Howard n’avait écrit qu’un épisode unique (rappelons qu’il n’a jamais voulu faire, contrairement à ses « continuateurs », une saga continue mais seulement une suite d’aventures distinctes avec un héros récurrent), Thomas développe un cycle gigantesque à partir de la situation initiale. Conan, compagnon d’aventures et amant de Bêlit, devient pirate sévissant dans les mers chaudes du Sud, après avoir voyagé à travers les déserts de glace du Nord, les anciennes civilisations de l’Est et les royaumes occidentaux dits civilisés. Howard préférait l’action aux longs discours et ne s’est jamais intéressé à l’origine de ses personnages, c’est donc Roy Thomas qui nous révèle celle de Bêlit (n° 59), une princesse qui, enfant, dut fuir après le massacre de sa famille et est devenue une boucanière redoutée afin d’exercer sa vengeance. La seconde partie de l’histoire originale est adaptée à l’occasion d’un numéro double (n° 100, juillet 1979), clôturant de façon magistrale le cycle, avec la mort de Bêlit. Dans l’intervalle, Marvel nous aura proposé le premier crossover de Conan the Barbarian avec une autre série, Marvel Feature (avec les aventures de Red Sonja dues à Thomas et Frank Thorne), dont le point culminant est le 68e épisode, une aventure improbable mais fabuleuse comme seul l’éditeur peut en produire : Conan, Bêlit et Sonja affrontent le roi Kull, transporté magiquement dans son futur avec son château et ses sujets, pour la possession d’une page d’un ouvrage style Necronomicon.

La mort de Bêlit laisse Conan plus mélancolique et sauvage que jamais tandis que derrière crayons et pinceaux des jours sombres attendent également les lecteurs. Alors que le Cimmérien vagabonde dans les pays noirs, l’imagination de Roy Thomas semble tourner en rond. Aussi abandonne t-il la série après le n° 115 où Conan retrouve de vieilles connaissances : les sorciers Zukala (cf. épisodes 5, 14-15) et Karanthès (cf. épisodes 67-68), et surtout Red Sonja (sa quatrième apparition dans la série après les épisodes 23-24, 43-44 et 66-68). Pour ressusciter Bélit, Conan accepte de livrer à Zukala son ennemi Karanthès mais il se retourne contre le sorcier quand il comprend que le prix à payer est la vie de la guerrière rousse (une idée qui resservira au scénariste pour le film Conan the Destroyer). L’épisode se clôt sur un Conan reprenant sa route solitaire, avec en toile de fond l’image du barbare couronné. Thomas laisse ainsi à ses successeurs d’ultimes consignes qu’il est difficile de ne pas suivre puisqu’elles étaient le fait de Howard lui-même dès la première apparition de son héros. En outre, Marvel vient de lancer en mars 1980 une troisième série, King Conan, qui conte les années futures ( !) du Cimmérien.

JPEG - 59.3 ko
King Conan

King Conan naît du désir de Roy Thomas d’adapter les aventures du roi Conan qui furent, rappelons-le, les premières que Robert E. Howard ait consacré au Cimmérien (Le Phénix sur l’épée et La Citadelle écarlate) - le Texan ayant ensuite préféré un Conan plus jeune, pas encore enchaîné par les responsabilités de la couronne -. Mais, chronologie oblige, ces adaptations ne pourront pas être publiées avant plusieurs années. La seule solution pour Marvel est d’éditer des numéros spéciaux. C’est ainsi que paraissent en 1974-75 Giant-Size Conan 1-4, adaptant le roman Hour of the Dragon. La suite de l’adaptation paraît dans Savage Sword of Conan 8 et 10 ! L’année suivante, c’est au tour du Phénix sur l’épée d’être adapté, dans Conan Annual 2. Roy Thomas imagine la suite des aventures du roi Conan dans Conan Annual 4-5 (1978-79), et c’est à la suite de ce succès que Marvel lance la série régulière King Conan, en espérant que ces aventures passionnent plus les lecteurs que celles du roi Kull, interrompues en 1978 pour cause de mévente (celles de Red Sonja ont connu le même sort en 1979). Thomas ne signe que les neuf premiers épisodes, adaptations des romans de Sprague de Camp Conan l’Aquilonien et Conan le vengeur. Le roi passe son temps, semble t-il, à délivrer son épouse ou son fils de ravisseurs travaillant pour des royaumes rivaux. Qu’il abandonne le personnage par lassitude (194 numéros toutes séries confondues !) ou à la suite d’un désaccord avec Marvel (il passe à l’ennemi, DC Comics, notamment pour une originale mais décevante série de fantasy, Arak, Son of Thunder), le départ de Thomas marque la fin d’une époque et même, n’hésitons pas à le dire, de l’Age d’Or de la saga.

J.M. de Matteis, scénariste généralement moyen, devient l’auteur régulier de Conan the Barbarian au 118e épisode, toujours avec John Buscema aux pinceaux. Il suit la voie de Thomas, réintroduisant des personnages créés par son prédécesseur. L’univers hyborien vu par Matteis est plus féerique que cauchemardesque, avec autres dimensions, diable d’opérette, cité dans le ciel, mais l’auteur y insuffle une fatalité toute howardienne, comme dans les épisodes 122-125 où Conan doit affronter de jeunes innocents pervertis par leur héritage (la dégradation de l’innocence est semble t-il un de ses sujets de prédilection, cf. Defenders 100). D’ailleurs, de Matteis ne pervertirait-il pas l’héritage laissé par Roy Thomas ? La garce Jenna (des épisodes 6 et 8-11) réapparaît défigurée par la lèpre (n° 118) et Murilo (n°s 11, 52-55) est devenu un gentilhomme bien nourri. Après une dizaine de numéros, il laisse la place à Bruce Jones, connu pour ses histoires d’épouvante à chute cruelle (et auteur des aventures de Sonja dans Marvel Feature en 1976). Dans le même temps, John Buscema abandonne lui aussi Conan, sans doute par lassitude (tout de même 90 Conan the Barbarian, 78 Savage Sword of Conan, 9 King Conan !). Avec Gil Kane, qui dessine les épisodes 127-134 (octobre 1981-mai 1982) pour de Matteis puis Jones, Conan prend « un coup de jeune » et redevient un svelte voleur alors que Buscema le voyait comme un massif guerrier. Le cynisme de Jones met le Cimmérien face à la cruauté humaine : ce sont les hommes qui rendent le monde hyborien impitoyable et le sens de l’honneur du barbare fait de lui une marionnette pour des sorciers retors et des femmes fatales. Jones reste aux commandes jusque août 1983 (n° 149), mais les artistes se succèdent, notamment Buscema de retour épisodiquement, pour dépeindre un monde où l’horreur est omniprésente, la froide et inhospitalière Cimmérie, pays natal de Conan où le scénariste situe l’action pour jouer à fond la carte du rajeunissement. Michael Fleisher, « vieux routier » qui a travaillé notamment pour Marvel (Ghost Rider) et DC (Jonah Hex), reprend l’action où Jones l’a laissée, en Cimmérie. Comme dans ses deux séries-vedettes citées plus haut, son thème de prédilection est la différence, et donc l’intolérance. Son barbare s’y montre plus ouvert que les civilisés qu’il rencontre (c’était déjà le cas pour l’impitoyable chasseur de primes Jonah Hex). Si parfois Fleisher manque singulièrement d’imagination (jusqu’à réutiliser certaines de ses idées pour d’autres séries), il crée néanmoins des personnages intéressants, comme celui de l’ange-guerrier Alhambra, différente des habituelles conquêtes de Conan (épisodes 153, 154, 168). Les numéros 161-170 (août 1984-mai 1985) forment un long cycle où l’esprit de sacrifice le dispute à l’intolérance et la trahison, cycle qui conclut la prestation du scénariste, assisté de Buscema au graphisme. Les épisodes de Fleisher, comme ceux de Matteis et Jones, doivent beaucoup moins à Howard (en matière de géographie comme d’inspiration) que ceux de Thomas mais sont néanmoins d’un niveau honorable. Après l’aventurier chevauchant vers un destin qui lui a été prédit (Thomas), le solitaire mélancolique, marionnette de ce même destin (de Matteis) et le vagabond cynique (Jones), Michael Fleisher a insisté sur le côté sensible ( !) du personnage. Ce qui distingue ces quatre Conan, c’est leur réaction face à la cruauté du monde qui les entoure : une certaine indifférence et la confiance en sa seule épée chez le premier, une indifférence teintée de fatalisme chez le second, le cynisme, et enfin la compréhension, ce qui est plutôt paradoxal au vu de l’évolution des trois premiers.

Sur King Conan, c’est Doug Moench qui remplace Thomas, et c’est toujours la même suite répétitive de luttes contre sorciers et traîtres qui menacent le royaume. Graphiquement aussi la transition est minime, Buscema étant remplacé par son encreur habituel sur les aventures du Cimmérien (depuis 1973 !), Ernie Chan. Les récits de Moench ne doivent pas plus à Howard que ceux des autres successeurs de Roy Thomas. Le quinzième épisode est un hommage ironique au Mythe : s’ennuyant souvent sur son trône (idée unanimement utilisée, de Howard à Milius), Conan, déguisé et affublé d’une barbe postiche, se met la nuit à hanter les tavernes en quête d’aventures. Il a ainsi l’occasion de rencontrer un jeune brigand, en qui il reconnaît le voleur qu’il était lui-même. Le voleur découvre la véritable identité de notre barbare et avoue que le Cimmérien est son idole. Tous deux partent à la recherche d’un trésor, avant que Conan, tel Kull, modèle direct des scénaristes de King Conan, ne se résigne à retourner gouverner. Parfois les idoles doivent être remplacées, conclut le voleur, et n’est-ce-pas Roy Thomas autant que Conan qui est visé ? Alan Zelenetz prend la relève dès l’épisode suivant et accorde une place plus importante au prince Conn, fils de Conan, autre manière de montrer un Conan plus aventurier que monarque, le prince étant plus libre et plus jeune. Mais rien n’y fait, c’est le passé du personnage (les années Thomas et bien sûr le Conan original de R.E.H.) qui fait de lui un personnage plus grand que nature : le Mythe survit grâce à ce passé. Les sujets se suivent et se ressemblent (combien de fois Conn ou la reine Zenobia ont-ils été enlevés ?), c’est au niveau psychologique que Zelenetz cherche le renouvellement, développant les personnages secondaires (contrairement à Moench, le nouveau scénariste comprend qu’un roi n’est pas un héros solitaire) : Radegund, fille de Conan, et Taurus, le fils mal-aimé qui se consacre à l’étude de la sorcellerie par dépit, le comte Trocéro, ami fidèle du roi, les Dragons Noirs, sa garde d’élite, la maladroite sorcière Zandra qui s’associe avec Taurus pour renverser Conan. Et bien sûr Conn : un nouveau cycle débute au numéro vingt (où le titre est rebaptisé Conan the King, les changements de titres sont toujours un signe de mauvaises ventes), par la mort du prince, au cours d’une tentative d’enlèvement (une de plus). Mais Conn n’est pas mort et tandis que son père cherche vengeance, il obtient sa propre série en back-up feature, aventures en solo du prince égaré dans un pays lointain, manière pour le scénariste de retourner aux sources par le biais d’un personnage plus jeune, un « nouveau Conan » en quelque sorte, afin de conquérir un nouveau public.

JPEG - 258.8 ko
Conan The King

Savage Sword of Conan est le titre qui a le plus souffert du départ de Roy Thomas : le magazine se consacrait aux adaptations des nouvelles de Howard et de ses « continuateurs », sans souci de la continuité qui était réservée aux comics. Les nouveaux scénaristes, quels qu’ils soient (et ils sont nombreux ! Michael Fleisher, Bruce Jones, Larry Yakata, Don Kraar, Charles Dixon, James C. Owsley, Gerry Conway, Doug Murray, John Arcudi, Doug Moench), offrent aux lecteurs des aventures « originales » du barbare, souvent médiocres, et bien qu’ils ne s’agissent plus d’adaptations la continuité n’est pas pour autant à l’honneur : Conan est tantôt aventurier, tantôt mercenaire, tantôt pirate. En dépit de références howardiennes, le monde hyborien présenté dans SSoC 105-189 n’a aucun rapport avec celui imaginé par le Texan. Ce qui ne veut pas dire que les effrayantes régions imaginées par Dixon, Yakata ou Kraar soient dénuées d’intérêt, elles sont bien dans l’esprit du magazine, plus violent, plus adulte que les comics. Mais le graphisme non plus n’est pas à la hauteur : Gary Kwapisz, Ernie Chan, Mike Docherty, Armando Gil ne sont pas favorisés par le noir et blanc peu attrayant, car ils n’ont pas le talent du duo Buscema/Alcala (dont le style convenait parfaitement au noir et blanc, plus qu’à la couleur). A l’époque (1984-91), Marvel souffre d’un manque chronique de talents, qui se manifeste tant sur le plan graphique que scénaristique, par une qualité inégale allant du plagiat ennuyeux à la fantasmagorie la plus originale.

Un scénariste nouveau venu prend Conan the Barbarian en main en juillet 1985 (n° 172). Ce premier épisode où Conan sauve un cupide marchand et sa jeune et innocente fille soi-disant égarés en terre picte ne laisse pas présager la formidable épopée que James C. Owsley va bâtir sur trois ans et dont il n’est que le prologue. Owsley fait fi de tout ce qu’a pu vouloir Thomas et, tout en respectant la mythologie et la géographie howardiennes, construit son propre Conan Universe. Jusqu’ici plus ou moins solitaire, Conan devient membre d’un groupe hétéroclite de plus en plus important dont les membres (y compris le Cimmérien) ne vont pas cesser d’évoluer au fil des épisodes. Tous forment une alliance précaire pour découvrir un trésor mais obtiennent à la place l’inimitié du démon à apparence d’enfant nommé Nostume. Comme Alan Zelenetz (Conan the King 16-29), Owsley accorde énormément d’importance aux seconds rôles, comme la virginale Tetra qui, corrompue par le pouvoir de Nostume, devient une menace encore plus terrifiante, Keiv, le voleur amoral qui découvre la notion d’honneur alors même qu’il est transformé en monstre, le prêtre-guerrier Kaleb et sa fille Solaise, qui cachent un terrible secret qui pourrait menacer l’univers... et Red Sonja elle-même, après sept ans d’absence ! Une Sonja plus féminine, plus vive, que Owsley redéfinit à son aise et à qui il fait subir ce que personne (surtout pas Roy Thomas !) n’aurait cru possible : la vierge guerrière se fait violenter. Les adversaires de Conan imaginés par Jim Owsley sont eux aussi plus grands que nature : Imhotep le ravageur de mondes, le Dévoreur d’Âmes, Thulsa Doom, l’ennemi juré de Kull ramené des Enfers par le scénariste afin de lutter contre le Dévoreur, et ce aux côtés du Cimmérien ( !). Au scénariste vient s’adjoindre un autre nouveau venu en février 1987 (n° 191), le dessinateur Val Semeiks. Son style est assez semblable à celui de Buscema mais il perd en puissance ce qu’il gagne en recherche de la perfection du trait. Les épisodes 209-214 marquent une nouvelle fois la fin d’une époque (comme à chaque départ de scénariste), Owsley abandonnant les épopées pour de courtes histoires baignées de métaphysique. Conan y reprend sa route solitaire et, en traversant le désert entre Koth et Turan, découvre un univers de masques et de phantasmes. Au cours de la période James C. Owsley le barbare a prouvé ses talents de meneur d’hommes, annonçant le roi qu’il deviendrait un jour. Il avait déjà affronté ou aidé des dieux ou déesses, ici il a été leur porte-parole, leur messager.

JPEG - 37.1 ko
Adaptation en Bd du film de Milius par Buscema

Dans le même temps, Conan the King périclite et en disparaissant en 1989 devient la seule série Conan à n’avoir pas trouvé un succès suffisant (seulement 55 numéros). Marvel a appris à ses dépens ce que Robert Howard avait compris très vite en abandonnant Kull au profit de Conan : un roi, prisonnier de son trône, est moins intéressant qu’un aventurier. En 1985, Don Kraar avait succédé à Zelenetz, projetant la série dans une nouvelle direction inspirée des aventures de Conan le conquérant écrites par Sprague de Camp, traçant un trait sur les innovations de son prédécesseur, en faisant notamment périr tous les Dragons Noirs et revenir Conn. Zelenetz nous avait fait découvrir un Conan plus humain que la douleur rendait fou et injuste, Kraar en a refait un roi-soldat et l’a plongé dans un mélodrame cornélien (fils enlevé à la naissance et élevé pour tuer son père, fille tombant amoureuse du fils d’un ennemi de Conan...), se terminant dans le sacrifice et par l’abdication du roi. En 1989, Owsley, remarqué sur Conan the Barbarian, avait été chargé de sauver le titre à l’occasion du numéro 50, reprenant l’action là où Zelenetz l’avait laissé, le mélange épopée/mélodrame étant visiblement un échec. Résultat : les Dragons Noirs sont toujours vivants, parmi lesquels le fiancé de Radegund, Taurus également (toujours féru de sorcellerie et jamais kidnappé à la naissance !), et Conn erre toujours dans la lointaine Khitaï. Victimes de ce retour à la « normalité » : le gendre et le petit-fils de Conan. Tous ces bouleversements contradictoires sont sans doute une autre raison de l’échec de la série.

Dans les mois qui suivent le départ de Owsley en 1988, Conan the Barbarian ne se porte pas mieux que ses deux séries-sœurs, un déclin très net dû à la valse des scénaristes (Charles Santino, Larry Hama, Michael Fleisher, Gerry Conway) et des dessinateurs (Semeiks, Gary Kwapisz, Don Perlin, Alfredo Alcala, Jose Delbo, Dwayne Turner, Frank Springer). Le sentiment général est celui du déjà-vu (échappent à cette médiocrité le 220, dernier numéro de Santino et Semeiks, et les 226-227, dus à Conway, Delbo et Texeira). Marvel décide d’appliquer un plan d’urgence. Et quitte à effectuer un nouveau départ, autant redémarrer à zéro pour retrouver de bonnes bases. Le numéro 232 (juillet 1990) s’intitule d’ailleurs The Coming of Conan comme le numéro 1 mais fait pourtant suite à Conan the King qui vient de s’achever : le roi Conan raconte à son fils sa vie aventureuse. La nouvelle version n’est donc qu’un long flash back, qui débute de la même manière que le premier épisode, par un combat singulier sur un champ de bataille du Nord. Mais le héros de la séquence n’est pas Conan mais son grand-père. Le numéro se clôt par la naissance de notre héros : le scénariste Michael Higgins est donc le premier à révéler l’origine de Conan, à qui est promis un glorieux destin dès le premier instant de son existence. Ces nouvelles histoires sont peu intéressantes et le graphisme de Ron Lim, nouvel artiste-vedette de la Marvel dans la lignée des Kirby, Buscema et Byrne, manque de la puissance et de la précision de celui de ces modèles. Cette déception ne fait rien pour arranger les ventes, Higgins est prié d’aller voir ailleurs et Marvel « commande » un numéro 240 destiné à conclure l’intrigue en cours, à la rattacher artificiellement à Conan the Barbarian 1 dont elle devient un prologue. La fin du numéro nous ramène à la cour du roi d’Aquilonie, où Conan raconte une nouvelle histoire, sa mémoire le ramenant à l’époque où il quittait Turan pour Khoraja (Conan the Barbarian 115).

Marvel fonde de grands espoirs sur la saga amorcée dans Conan the Barbarian 241 : le nouveau scénariste se nomme... Roy Thomas. Après les échecs de ses successeurs, il est en position de force. Il décide de ne pas s’occuper des dix années qui ont suivi son départ et reprend l’action au n° 115 (il considère tout de même que du temps a passé depuis mais sans s’appesantir sur le sujet). Nous retrouvons notre barbare préféré garde du corps du sorcier Karanthès qui doit célébrer un mariage... et la future mariée n’est autre que Red Sonja ! La vierge guerrière doit épouser El-Ron, fils du défunt sorcier Zukala (tous ces personnages, ou presque, sont apparus dans le 115), qui l’a loyalement battu en duel. Or Sonja a jadis fait le vœu d’appartenir à celui qui l’a vaincrait - ce que même Conan n’avait pu réussir -. Il est compréhensible que Thomas n’accepte pas la Sonja vaincue de Owsley (CtB 196-199, Annual 12, 200, 204, 205), et que Conan soit sceptique quant à la défaite de son amie, invaincue la dernière fois qu’il l’a rencontré (CtB 115, et non 205, censé ne pas avoir eu lieu... comme tous les épisodes précédents !). Et en effet Red Sonja a été vaincue magiquement et El-Ron n’est autre que Zukala. Pour faire table rase du passé récent, le scénariste se réfère régulièrement à un passé plus lointain : dans les numéros 244-245, Conan affronte Varnae, le premier vampire du Marvel Universe (vu notamment dans Dr Strange et Blade), avec l’aide du magicien noir Zula, compagnon des années Bélit (CtB 84 et suivants), puis c’est le début d’une longue saga (246-250) où Conan, Sonja et Zula, mercenaires à Khoraja, aident la princesse Yasmela contre le sorcier ressuscité Natohk. Il s’agit d’une réécriture, pour l’insérer dans la chronologie récente, de la nouvelle Le Colosse noir, déjà adaptée, plus fidèlement, dans SSoC 2. Les numéros 252-260 forment un autre excellent cycle, cette fois sorti de l’imagination de Thomas, The Second Coming of Shuma Gorath. Conan, désormais seul (Sonja et Zula l’ont quitté au terme du n° 250), y retourne en Cimmérie et, lors du trajet, retrouve lieux et adversaires de jadis : les événements de SSoC 3 (d’après Ombres dans la nuit de Sprague de Camp) dans le 252, ceux de CtB 12 et ceux de CtB 14-15, avec le magicien stygien Kulan Gath, dans le 253, ceux de SSoC 39, avec la reine hyperboréenne Vammatar, (d’après Les Légions de la mort de Sprague de Camp) dans le 254, ceux de CtB 8 dans les 255-256, ceux de CtB 7 dans le 257... Le point culminant du cycle est le retour, dans les épisodes 259-260, du dieu lovecraftien Shuma Gorath, entité antédiluvienne imaginée par Howard dans La Malédiction du crâne d’or, récit inachevé du cycle de Kull (mais ce n’était pour lui qu’un nom parmi d’autres du Cycle de Cthulhu, les Yog Sothoth, Nyarlathotep et autres Tsathoggua). Hélas, le graphisme n’est pas à la hauteur, assuré par Gary Hartle, puis Mike Docherty, médiocre sous-Buscema particulièrement prolifique puisqu’il fut le dernier artiste régulier des trois séries Conan (plutôt significatif, non ?) : CtK de 1985 à 1988, SSoC de 1986 à 1995, CtB de 1991 à 1993.

JPEG - 21.6 ko
The Horn of Azoth, adaptation en BD du script qui devait servir au deuxième film. Il fut plus que transformé ! (dessins de Mike Docherty)


Conan the Barbarian est stoppé en décembre 1993, après 275 numéros. Ainsi disparaît un phénomène de longévité : aucun autre comic book de fantasy n’a duré aussi longtemps. Ni la revitalisation du personnage (par Michael Higgins), ni le retour de Roy Thomas n’ont permis à ce héros sexagénaire de retrouver sa gloire passée. Mais la série se poursuit en noir et blanc dans SSoC 217-235, toujours due à Thomas et, hélas, Docherty (heureusement, les dégâts sont limités par l’encrage d’E.R. Cruz, dont le style élégant évoque Alcala, de Zuniga ou Marcos). C’est bien la preuve que Marvel n’en a pas fini avec le Cimmérien. A la même époque, la télévision américaine diffuse avec succès une série de dessins animés intitulée Conan the Adventurer. C’est donc tout naturellement que la compagnie démarre en juin 1994 une nouvelle série de comics sous le même titre (bien qu’il ne s’agisse pas d’une adaptation). Thomas se retrouve donc en charge de trois séries : SSoC, avec les adaptations de romans publiés chez Tor Books d’une part, et la suite de CtB d’autre part, et ce nouveau titre consacré aux années de jeunesse du barbare (une première puisque l’expérience Higgins ne compte pas pour Thomas). Le point de départ de cette nouvelle saga est le mythique sac de Venarium conté enfin avec le souffle épique qu’il mérite. Retour aux sources, donc, accentué par le graphisme de Rafael Kayanan, digne du Barry Smith des grandes années. Hélas, en 1995, Marvel doit arrêter un grand nombre de titres pour cause de mévente, et toute la gamme Conan est du nombre : Savage Sword of Conan (235 numéros en noir et blanc depuis 1974), Conan Saga (98 numéros depuis 1987, superbe magazine de rééditions et de documentation sur le Mythe), Conan the Adventurer (14 numéros) et Conan Classic (réédition de CtB au même format comics démarrée en même temps que CtA).

JPEG - 152.2 ko
Conan the Savage

Loin de renoncer, Marvel lance deux nouveaux titres le mois suivant (août 1995), comptant une nouvelle fois sur l’impact commercial de nouveaux « numéro un » : le comic book Conan et le magazine Conan the Savage. Plus question de retour aux sources, il s’agit d’une mise au goût du jour : dans les années 70, Conan détonait par sa violence et sa moralité douteuse au milieu des super-héros bien clean. Un quart de siècle plus tard, les justiciers ultra-violents (Punisher, Wolverine, Lobo...) sont devenus légion et c’est le Cimmérien qui paraît désormais dépassé. C’est donc sous le signe de la violence la plus extrême possible qu’est placé ce renouveau, et Thomas est évincé au profit de deux scénaristes popularisés par des séries ultra-violentes : Larry Hama (Wolverine) sur Conan et Charles Dixon (Punisher) sur Conan the Savage. La série couleurs fait directement suite à Conan the Adventurer mais Hama ne trouve pas son point de départ chez Thomas, Howard ou Sprague de Camp, mais dans le film de John Milius Conan the Barbarian, une des rares réussites en matière de cinéma barbare : Conan, voleur à Zamora, est arrêté et jeté comme gladiateur dans un de ces mortels « Puits de combat » où il faut tuer ou mourir. Le script ultra-violent est bien servi par le graphisme de Barry Crain. Son Conan est une force de la nature qui, dans ses moments de fureur, n’a pratiquement plus figure humaine. Son trait n’a pas la puissance esthétique d’un Buscema (qui évoque les statues antiques, surtout sous l’encrage d’Alcala) ou d’un Adams, ni le dynamisme élégant d’un Smith, d’un Kane ou d’un Kayanan, Crain dessine des corps pratiquement déformés aux musculatures hypertrophiées, un style influencé par celui de Simon Bisley, dont la série de fantasy anglaise Slaine est plus barbare encore que le Conan de la Marvel. Bisley est un disciple de Frazetta, le champion des « muscles hypertrophiés » et premier grand illustrateur de Conan, et il a toujours souhaité dessiner le plus grand héros barbare. Marvel accède à son désir en lui confiant la couverture de Conan the Savage 1. La boucle est bouclée.

En Novembre 1995, Marvel organise une rencontre entre Conan et un autre populaire personnage, un des rares crossovers faisant intervenir le héros de Howard (les autres sont CtB 14-15, avec Elric, et What If... ? 39 et 16, des histoires de réalités alternatives). Le Cimmérien y affronte un terrifiant adversaire sur trois numéros (Conan 4 par Hama, Crain et Garzon, Conan vs Rune 1 par Barry Windsor-Smith - un quart de siècle après qu’il ait créé graphiquement Conan pour Marvel - et Conan the Savage 4 par Dixon et Alcatena) : l’ultra-vampire Rune, créé par Barry Windsor-Smith (que les fans de Conan connaissent sous le nom de Barry Smith) pour l’éditeur Malibu. Ce crossover est une des manifestations de l’absorption de Malibu Comics par Marvel, qui a pour conséquence la fusion de deux univers : le Marvel Universe et l’Ultraverse. Le crossover Conan vs Rune est l’événement le plus marquant de la nouvelle série, et après le retour aux sources la modernisation n’est guère plus profitable à Conan : les deux nouvelles séries s’interrompent après à peine une année d’existence. Le verdict est clair : Conan est un personnage démodé. Du moins aux États-Unis car en Europe sa popularité ne s’est pas affaiblie : dans les pays latins principalement comme l’Espagne, le Portugal et l’Italie (et le Brésil), mais aussi en Allemagne, en Norvège et bien sûr en France. Chez nous, c’est Arédit qui entreprend de traduire Conan the Barbarian en 1974, d’abord dans des petits formats en noir et blanc puis dès 1979 en albums couleurs grâce au succès croissant du personnage (encore accru par le film de 1982). Savage Sword of Conan a été achetée par un autre éditeur, Lug, mais les neuf albums en noir et blanc publiés en 1976-79 ne remportent pas un franc succès (alors qu’ils sont maintenant très recherchés !). C’est tout naturellement Arédit qui en reprend les droits en 1980. Mais l’éditeur de Tourcoing est victime de son succès : à force de trop vouloir publier et n’importe comment il fait faillite en 1991 après plusieurs années laborieuses (Conan le barbare s’est interrompu en 1985). L’éditeur que personne n’attendait prend la relève en 1985, Mon Journal, spécialisé dans les petits formats et qui jusqu’à présent ne s’est pas intéressé à l’univers des comics. Super Conan devient le titre-phare de cet éditeur sur le déclin, qui s’écroule lorsque Marvel ne renouvelle pas le contrat à la fin de l’année 1989. L’année suivante, les séries Conan sont rachetées par Sémic (ex-Lug) jusqu’à ce qu’une nouvelle fois, fin 1996, Marvel ne renouvelle pas le contrat : l’éditeur américain décide de s’auto éditer en Europe. Avant Marvel France, l’éditeur de Conan avait déjà installé des filiales en Grande-Bretagne, en Italie et en Allemagne. Et c’est en Italie que voit le jour une série d’aventures de Conan inédites aux U.S.A. car éditées par Marvel pour le public italien. En France, cette série Conan the Conqueror fort inspirée de Savage Sword of Conan est traduite en 1997-99 et est victime de son succès lorsque Conan (10 numéros en noir et blanc) cède la place à Conan le barbare désormais réservé à des séries couleurs. Cette série s’interrompt à son tour en 2001, lorsque Marvel décide de renoncer aux droits d’exploitation des héros howardiens, jugés définitivement démodés.

JPEG - 184.5 ko
Le premier album Conan chez Lug

La revue Conan le barbare de Marvel France a proposé aux lecteurs français la traduction de la série de la dernière chance, qui se présentait en fait sous la forme de séries limitées afin de limiter les risques d’échec. Chacune de ces séries propose donc un récit complet, indépendant des autres, plus à la manière des magazines que de la série continue. Marvel édite ainsi huit aventures entre Juillet 1997 et Octobre 2000 : The Stalker of the Woods par l’écrivain Roland Green et Castellini (traduite dans Conan 5-7 en noir et blanc), The Usurper par Dixon, Lieber et Janson, Lord of the Spiders par Thomas, Raffaele et Cabrera (traduite dans Conan 8-10 en noir et blanc), River of Blood par Green et Isherwood, Return of Styrm par Nixon, Parente et Soresina, Scarlet Sword par Thomas, Raffaele et Cabrera (traduite dans Conan le barbare 5-7), Death Covered in Gold par Thomas et Buscema (traduite dans Conan le barbare 2-4), Flame and the Fiend par Thomas et Isherwood (traduite dans Conan le barbare 8-10). Après l’échec de la modernisation tentée par Larry Hama, ces mini-séries, avec la présence de Roy Thomas au scénario, sont placées sous le signe de la nostalgie : le retour de Big John Buscema et celui de vieux personnages comme Valeria (Savage Tales 2-3 et SSoC 211-217), Isparana (SSoC 53-58), Jenna (CtB 6, 8-11, 118-120), Zula (CtB 84-94, 244-250), Fafnir (CtB 17-21, 161-170), Kulan Gath (CtB 14-15, 252-260). Ainsi aurait pu s’achever la saga en BD du plus grand héros barbare.

JPEG - 41.9 ko
Conan n°24 chez Dark Horse

En Février 2004 débute une nouvelle série Conan, éditée non plus par Marvel mais par Dark Horse Comics. Cet éditeur s’est imposé en vingt ans comme le spécialiste des adaptations de « franchises » littéraires et cinématographiques. Ses titres vedettes sont Star Wars et Aliens vs Predator, généralement sous la forme de séries limitées, méthode éditoriale plus prudente que celle de la série régulière pour limiter les risques d’échecs (et qui a influencé Marvel pour sa dernière série d’aventures de Conan). Dark Horse est réputé pour la qualité constante de ses titres (ce qui est rare pour des Movie Comics, cf. ceux de Marvel Comics). Conan ne fait pas exception à la règle. Le scénariste Kurt Busiek retourne aux sources littéraires, sans se laisser influencer par l’exemple de Roy Thomas : il s’agit d’une nouvelle interprétation de la saga de Conan le Cimmérien, avec des aventures inédites et de nouvelles adaptations contées chronologiquement. Ce nouveau départ est brillant, et le graphisme de Cary Nord (parfois assisté de Thomas Yeates) évoque les plus belles planches de SSoC dues au duo Buscema/Alcala. Celles-ci étaient en noir et blanc mais ici la superbe mise en couleurs de Dave Stewart n’amoindrit pas la beauté des dessins comme cela avait été le cas lors de la colorisation des SSoC par Arédit. Malgré ces qualités, le succès était tout sauf prévisible ; verdict : le nouveau Conan est un triomphe, tant commercial que critique (avec un Eisner Award à la clé). Fort de ce succès, Dark Horse s’apprête à fêter dignement le centième anniversaire de la naissance de Robert E. Howard. Las, Kurt Busiek est pour cela convié à participer à un projet spécial et quitte donc la série en mai 2006 (n° 28). Il était l’âme du Conan de Dark Horse comme Roy Thomas avait été celle de celui de la Marvel. Trois mois auparavant, Cary Nord avait provisoirement abandonné le graphisme à Timothy Truman, et bien que ce dernier soit talentueux, c’est l’homogénéité de la série qui souffre du changement d’équipe artistique : la série régulière signée Busiek et Nord était jusqu’à présent consacrée aux aventures de Conan respectant la nouvelle chronologie tandis que celles dessinées par Greg Ruth, toujours sur des textes de Busiek, s’intéressaient à la jeunesse du Cimmérien, l’engagement d’un artiste différent insistant sur la valeur d’interlude de ces épisodes et ne nuisant donc pas à l’homogénéité. Dans le même temps, d’autres artistes réputés sont engagés pour réaliser des séries limitées, consacrées aux aventures plus tardives du barbare (en son temps, Marvel avait lancé les Annuals puis King Conan pour les mêmes raisons : sinon, nous n’aurions pas eu droit aux aventures de Conan le conquérant avant plusieurs années !) : P. Craig Russell, auteur de plusieurs aventures d’un autre fameux héros d’heroic fantasy, Elric, adapte The Jewels of Gwahlur, Akira Yoshida et Paul Lee entraînent le roi Conan en Extrême-Orient dans The Demons of Khitai, Busiek s’associe avec Len Wein et Kelley Jones pour nous révéler les origines de Thoth-Amon dans Book of Thoth.

JPEG - 38.4 ko
Demons of Khitai, dessins de Paul Lee

L’homogénéité n’est pas de mise ici, mais cette diversité frappe aussi la série régulière après le n° 25, Dark Horse tardant à installer une équipe stable aux commandes : à Busiek succèdent Mike Mignola (29-31) et Truman (33-36), et à Nord, toujours Truman (26-27), Eric Powell (28) et Paul Lee (35-36). Et 2006 se termine sans que Dark Horse ait consacré quoi que ce soit d’exceptionnel à Robert E. Howard ! (uniquement du merchandising - des statuettes principalement - et des trade paperbacks rééditant les aventures de Conan sous forme de beaux volumes). C’est finalement pour DK Publishing que Kurt Busiek participe à un projet du centenaire howardien digne de ce nom, Conan : The Ultimate Guide to the World’s Most Savage Barbarian, écrit par Roy Thomas, très bel album mais qui n’apprend absolument rien au fan : la provenance des illustrations n’est même pas indiquée, ni le nom des artistes respectifs. Néanmoins, le lecteur se replongera avec plaisir dans les aventures du légendaire Cimmérien résumées ici par le grand scénariste Marvel dans le respect de la chronologie selon... Dark Horse ! D’où ce navrant paradoxe : Red Sonja est exclue du Conan Universe alors même qu’il s’agissait d’un des plus importants personnages imaginés par Thomas, essentiel dans la saga des guerres turaniennes (les références au personnage sont « gommées » dans le passage qui leur est consacré) ! Tout cela parce que ses droits d’exploitation appartiennent désormais à un autre éditeur, Dynamite Entertainment - et qu’un procès est même en cours concernant l’utilisation de ces droits !

Bibliographie des bandes dessinées Conan :

Marvel Comics :
Conan the Barbarian 1-275, Octobre 1970-Décembre 1993. n°s 1-15, 19-21, 23, 24 par Roy Thomas/Barry Smith. n°s 25-36, 38, 39, 41-56, 58-63, 65-68, 70-77, 84-86, 88-91, 93-115 par Roy Thomas/John Buscema.
n°s 17, 18 par Roy Thomas/Gil Kane.
n° 37 par Roy Thomas/Neal Adams.
Principaux épisodes (en italique les adaptations d’aventures de Conan de R.E.H.) :
1 : The Coming of Conan.
3 : The Twilight of the Grim Gray God, d’après R.E.H.
4 : The Tower of the Elephant.
7 : The God in the Bowl.
8 : The Hall of the Dead.
11 : Rogues in the House.
14-15 : A Sword Called Stormbringer.
17-18 : The Gods of Bal-Sagoth, d’après R.E.H.
23 : The Shadow of the Vulture, d’après R.E.H.
24 : The Song of Red Sonja.
30 : The Hand of Nergal.
37 : The Curse of the Golden Skull, d’après R.E.H. et Sprague de Camp.
58 : Queen of the Black Coast.
59 : The Ballad of Bêlit.
68 : Of Once and Future Kings.
100 : Death on the Black Coast.
104 : The Vale of Lost Women.
106-107 : The Snout in the Dark.
King-Size Conan Annual 1, 1973, Giant-Size Conan 1-5, Septembre 1974-1975, Conan Annual 2-12, 1976-1987.
n°s G-S1-4, A6 par Roy Thomas/Gil Kane.
n° A2 par Roy Thomas/Vicente Alcazar.
n°s A4-5, par Roy Thomas/John Buscema.
Principaux épisodes :
G-S1-4 : Conan the Conqueror, Parts 1-4.
A2 : The Phoenix on the Sword.
A4 : The Return of the Conqueror.
A5 : The Bride of the Conqueror.
Savage Tales 1-5, Mai 1971-1974.
n°s 1-3 par Roy Thomas/Barry Smith.
n° 4 par Roy Thomas/Gil Kane.
n° 5 par Roy Thomas/Jim Starlin.
Principaux épisodes :
1 : The Frost Giant’s Daughter.
2-3 : Red Nails.
4 : Night of the Dark God, d’après R.E.H.
Savage Sword of Conan 1-235, Août 1974-Juillet 1995.
n°s 1-5, 7, 10-12, 15-24, 26-28, 31, 32, 36-43, 45, 47-58, 60, 190-200, 202-210, 222, 225, 234, 235 par Roy Thomas/John Buscema.
n°s 6, 228 par Roy Thomas/Alex Nino.
n° 8 par Roy Thomas/Gil Kane.
n° 9 par Roy Thomas/Pablo Marcos.
n° 14 par Roy Thomas/Neal Adams.
n° 25 par Roy Thomas/Dick Giordano.
n° 30 par Roy Thomas/Frank Brunner.
n° 33 par Roy Thomas/Gene Colan.
n° 34 par Roy Thomas/Carmine Infantino.
n° 44 par Roy Thomas/Sal Buscema.
n° 46 par Roy Thomas/Ernie Colon.
n° 59 par Roy Thomas/Mike Vosburg.
Principaux épisodes (en italique les adaptations d’aventures de Conan de R.E.H. ; sauf indication de l’auteur les autres sont des adaptations d’histoires de R.E.H. transformées en aventures de Conan) :
1 : Curse of the Undead-Man.
2 : Black Colossus.
4 : Shadows in the Moonlight.
5 : A Witch Shall Be Born !
6 : People of the Dark.
8 : Conan the Conqueror, Part 5.
10 : Conan the Conqueror, Part 6.
11 : The Abode of the Damned.
12 : The Haunters of Castle Crimson.
14 : Shadows in Zamboula.
15 : The Devil in Iron.
16-19 : The People of the Black Circle.
20 : The Slithering Shadow.
21 : Drums of Tombalku.
22-23 : The Pool of the Black One.
24 : The Tower of the Elephant.
25 : Jewels of Gwalhur.
26-27 : Beyond the Black River.
30 : The Scarlet Citadel.
31-32 : The Flame-Knife, d’après Sprague de Camp.
33 : The Curse of the Monolith, d’après Sprague de Camp.
34 : The Lair of the Ice Worm, d’après Sprague de Camp.
35 : Black Tears, d’après Sprague de Camp.
36 : Hawks Over Shem, d’après Sprague de Camp.
38 : The Road of the Eagles, d’après Sprague de Camp.
40-43 : Conan the Buccaneer, d’après Sprague de Camp.
47-48 : The Treasure of Tranicos.
49-52 : Conan the Liberator, d’après Sprague de Camp.
53-55 : Conan and the Sorcerer, d’après Andrew Offutt.
56-58 : Conan and the Sword of Skelos, d’après Andrew Offutt.
A Marvel Comics Super Special SSoC 2, Marvel Super Special SSoC 9, Marvel Super Special Conan the Barbarian 21, Marvel Super Special Conan the Destroyer 35.
King Conan 1-19, Mars 1980-Novembre 1983, Conan the King 20-55, Janvier 1984-Novembre 1989.
Principaux épisodes :
1-4 : Conan of Aquilonia, d’après Sprague de Camp.
5-8 : Conan the Avenger, d’après Sprague de Camp.
Conan Saga 1-97, Juin 1987-Avril 1995, rééditions.
Marvel Graphic Novel 19 : Witch-Queen of Acheron , 28 : Conan the Reaver , The Horn of Azoth , Conan of the Isles , Conan and the Ravagers Out of Time , The Skull of Set . Conan the Adventurer 1-14, Juin 1994-Juillet 1995.
n°s 1-5, 9-14 par Roy Thomas/Rafael Kayanan.
Conan Classic 1-11, Juin 1994-Avril 1995, rééditions.
Conan 1-11, Août 1995-Juin 1996, Conan vs Rune 1, Novembre 1995.
Conan the Savage 1-10, Août 1995-Mai 1996.
Principaux épisodes :
2-4 : The Stalker of the Snows, d’après H.P. Lovecraft, Conan the Barbarian 1-3, Juillet-Octobre 1997, Conan the Barbarian : The Usurper 1-3, Décembre 1997-Février 1998, Conan the Barbarian : Lord of the Spiders 1-3, Mars-Mai 1998, Conan the Barbarian : River of Blood 1-3, Juin-Août 1998, Conan the Barbarian : Return of Styrm 1-3, Septembre-Novembre 1998, Conan the Barbarian : Scarlet Sword 1-3, Décembre 1998-Février 1999, Conan the Barbarian : Death Covered in Gold 1-3, Septembre-Novembre 1999, Conan the Barbarian : Flame and the Fiend 1-3, Août-Octobre 2000.

Marvel Europe :
Conan the Conqueror (Marvel Italie), n°s 1-11, 1997-1998, traduits dans Conan 2-10 (Marvel France), Mai 1997-Mai 1999.

Dark Horse Comics :
Conan 1 et suivants, depuis Février 2004.
n°s 1-7, 9-14, 16, 17, 19-22, 24, 25 par Kurt Busiek/Cary Nord.
n°s 8, 15, 23, 32 par Kurt Busiek/Greg Ruth.
n° 18 par Kurt Busiek-Fabian Nicieza/John Severin-Bruce Timm.
n°s 26, 27 par Kurt Busiek/Timothy Truman.
n° 28 par Kurt Busiek/Eric Powell.
n°s 29-31 par Mike Mignola/Cary Nord.
n°s 33, 34, 37, 38, 41 par Timothy Truman/Cary Nord.
n°s 35, 36, 40 par Timothy Truman/Paul Lee.
n° 39 par Timothy Truman/Rafael Kayanan.
Principaux épisodes :
2 : The Frost Giant’s Daughter.
8 : Born on the Battlefield.
9-11 : The God in the Bowl.
15 : Born on the Battlefield, Part 2.
20-22 : The Tower of the Elephant.
23 : Born on the Battlefield, Part 3.
29-31 : The Hall of the Dead.
32 : Born on the Battlefield, Part 4.
41- : Rogues in the House.
Conan and the Jewels of Gwahlur
1-3, Avril-Juin 2005. n°s 1-3 par P. Craig Russell.
Conan and the Demons of Khitai 1-4, Octobre 2005-Janvier 2006.
n°s 1-4 par Akira Yoshida/Paul Lee.
Conan and the Songs of the Dead 1-5, Juillet-Novembre 2006.
n°s 1-5 par Joe R. Lansdale/Timothy Truman.
Conan and the Midnight God 1-5, Décembre 2006-Mai 2007.
n°s 1-5 par Joshua Dysart/Will Conrad.